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mercredi 18 janvier 2012

Dangerous méthod: Freud or not Freud?



La Psychanalyse
L'excellent film de David Cronenberg, Dangerous method nous replonge  dans l'univers des premières applications de la  psychanalyse.Freud fait déjà  figure de maître à penser et Carl Jung d'élève studieux puis rebelle. .. Le titre laisse à penser pourquoi parler de méthode dangereuse?
On peut  avancer que cela est dû au fait que le Docteur Jung séduit sa patiente et que l'amour passionnel et fusionnel, que cette séduction illicite provoque, entraîne un désarroi profond chez le jeune psychanalyste et chez  sa femme qui lui voue un amour sans tache. On peut dire aussi  qu' il y a là un facteur de désaccord avec le Docteur Freud, qui est inflexible et il a raison, sur la distance nécessaire entre un patient et son psychanalyste.
Les deux éminents médecins sont présentés comme des hommes ayant leurs faiblesses et leurs manies et addictions. Freud fume sans cesse et, on sait qu'il mourra en 1939 d'un cancer à la mâchoire, il se montre jaloux, il est peu ouvert à d'autres idées que les siennes fait preuve d'une attitude plutôt "politique" dans la formulation de sa théorie, en prenant bien  garde de ne pas heurter, de façon supplémentaire, l'opinion. De façon supplémentaire car, en fondant sa méthode thérapeutique sur la sexualité, les pulsions et un inconscient traînant le psychisme en laisse, il avait déjà suffisamment heurté les inhibitions de l"époque.
Jung est de son côté amoureux fou de sa patiente, se livre avec elle à de troublantes séances de sadomasochisme, pleure comme un enfant à la fin de sa liaison, mange gloutonnement en n'hésitant pas à se servir à lui tout seul une bonne moitié de plat de viande, devant des convives médusés. Des hommes ordinaires. Freud dit justement, à ce sujet, que les psychanalystes sont "autorisés" à avoir une petite dose de névrose.
Dangerous méthod est un bon film, les concepts freudiens et junguiens ne sont pas galvaudés, les dialogues sont précis et historiques et le spectateur, intéressé par ce domaine de la philosophie, (je considère, et je suis pas le seul ,les initiateurs de la psychanalyse comme des philosophes), peut, à travers l'oeuvre filmique, avoir une vue plus concrète, plus familière, des ces penseurs de l'âme humaine.

Sabina Spielben et Carl Jung interprêtés par Keira Knightley et Michaël Fassbenden


Lire une article du Monde qui titre à propos du film: "Une triangulaire dans l'antichambre de la psychanalyse"

http://www.lemonde.fr/cinema/article/2011/12/20/une-triangulaire-dans-l-antichambre-de-la-psychanalyse_1620823_3476.html  ****clic****


La psychanalyse est donc la discipline fondée par Freud qui a employé les termes, d'analyse psychique, d'analyse psychologique, d'analyse hypnotique dans un de ses articles, intitulé La psychonévrose de défense ( 1894), le terme de psycho-analyse  puis d'analyse venant plus tard, notamment en.1916..dans l'ouvrage célèbre, Introduction à la psychanalyse.
C'est à partir de 1922 que l'oracle de Vienne donnera des définitions plus précises de sa méthode thérapeutique qui se présente comme: "un procédé par l'investigation de processus mentaux à peu près inaccessibles autrement" ou encore, "une méthode fondée sur l'investigation pour le traitement des désordres névrotiques" et arriver d'une façon plus générale à: "une série de conceptions psychologiques acquises (par le moyen de l'investigation) et qui s'accroissent ensemble pour former une nouvelle discipline scientifique", (Vocabulaire de la psychanalyse, Laplanche e Pontalis, p 351, PUF, 1967.


La  méthode, telle qu'elle nous est parvenue, est longue, difficile et coûteuse. On peut la résumer ainsi: il s'agit d'amener à la conscience le psychisme refoulé, cause de névroses et du cortège multiforme de symptômes psychiques et somatiques qui vont de pair. Ces symptômes et ces manifestations pathologiques étant composés de motifs et de motions pulsionnelles dont l'analysant ne connaît rien au départ du voyage, sur le divan.L'analyse consistera à tenter d'y voir clair dans ce qui est refoulé.

Le vacarme du refoulé

Dans un ouvrage fondamental, Cinq leçons sur la psychanalyse, 1921, voici ce que dit Freud à propos du refoulement. La métaphore est claire et explicite et renvoie chacun de nous, vraisemblablement à une problématique passée ou présente, personnelle ou observée chez quelqu'un d'autre.


"J'illustrerai le processus du refoulement et sa relation nécessaire avec la résistance par une comparaison grossière. Supposez que dans la salle de conférence, dans mon auditoire calme et attentif, il se trouve un individu qui se conduise de façon à me déranger et qui me trouble par des rires inconvenants, par son bavardage ou en tapant du pied. Je déclarerai que je ne peux plus continuer à professer ainsi; sur ce quelques auditeurs vigoureux se lèveront et, après une brève lutte, mettront le personnage à la porte. Il sera "refoulé" et je pourrai continuer ma conférence. Mais, pour que le trouble ne se reproduise plus, au cas où l'expulsé essayerait de rentrer dans la salle, les personnes qui sont venues à mon aide iront adosser leurs chaises à la porte et former ainsi comme une "résistance". Si maintenant l'on transporte sur le plan psychique les événements de notre exemple, si l'on fait de la salle de conférence le conscient, et du vestibule l'inconscient voilà une bonne image du refoulement.
Emotions  inconvenantes, paroles déplacées, manifestations bruyantes, tel se présente le contenu de ce qui devra être refoulé par le discours officiel. Le refoulement, fruit d'une "révolte active" ne résout pas celle-ci, le refoulé garde sa force, voire sa virulence, et peut se montrer encore offensif et perturbant en faisant de l'extérieur  cette fois, un "vacarme insupportable"... Freud, Cinq essais sur la psychanalyse, 1921.
                                   
Freud et Jung dans Dangerous method
                                          

Analyse

Quelle est la signification de ce terme qui est au centre de la méthode freudienne?
 Analyse signifie "fractionnement", "décomposition", et suggère une analogie avec le travail que fait le chimiste. Il ne s'agit pas de laisser le patient en miettes et, à la suite de cette recherche sur soi, succède une phase de synthèse, une sorte de restauration de ce qui avait été détruit par la décomposition. Cette synthèse se traduit souvent dans la vie de l'analysant par un changement de style de vie, voire de profession ou de conjoint ou encore par l'écriture d'un roman.Dans le meilleur des cas.

Voici en guise d'illustration une page du Net présentant un roman autobiographique superbe et intense: Les mots pour le dire de Marie Cardinal. C'est l'histoire d'une femme qui effectue le "voyage en psychanalyse", avec les périodes enthousiastes et les moments immanquablement difficiles. A lire, pour savoir, se faire une idée.
                      
http://www.lalivrophile.net/les-mots-pour-le-dire-de-marie-cardinal.html***Clic***



L'inconscient

La notion est, à présent mal vue, en cette période d'individualisme et d'affirmation forcenée de l'ego. C'est le moins qu'on puisse dire. La théorie freudienne considère que les manifestations pathologiques, plus ou moins partagées par la plupart des individus, sont dues à un amalgame de pulsions rassemblées dans le ça. Cette instance pulsionnelle, à deux pôles plus ou moins imbriqués, va se glisser, en petites manifestations ou en débordements intempestifs, dans les actes manqués, les rêves, dans les paroles, les actes, les idées que l'on a, les attitudes et pourquoi pas les idéologies, surtout les idéologies. Le nazisme n'est-il pas par exemple une actualisation quasi parfaite de la pulsion de mort?
Plus banalement, le ça se glisse dans les renversements d'affection, l'amour qui se change en haine ou vis  et versa ou cela se voit fréquemment par le retournement sur soi de l'agressivité et donc par les suicides chroniques que sont les différentes addictions, à commencer par le tabagisme.

Les implications philosophiques de cette théorie sont importantes.Pour aller droit au but, le problème est de savoir si nous parlons ou, si nous sommes parlés par notre inconscient, ce "voyou structuré comme un langage", selon le mot de Lacan. En fait Freud change du tout au tout l'image que l'homme se forme de lui-même et, atteint de façon radicale sa prétention à l'objectivité ou à l'impartialité. Selon le psychanalyste, il n'existe pas d'homme qui ne soit mû par des tendances inconscientes.
Cela est à la base de la petite guerre intellectuelle qui a eu lieu dernièrement entre partisans et détracteurs de la psychanalyse dont un des rebelles déclaré est Michel Onfray et son adversaire, Elisabeth Roudinesco, en citadelle assiégée.
Il y a longtemps que ce conflit couve sous la cendre. Je propose un petit cheminement dans Pensées et Complexités pour y voir plus clair. Je vais parler de Onfray,  de Sartre, de  Freud, de Jung et de tout ceux que je croiserai au hasard pas si hasardeux que cela de mes lectures.

Pour terminer cette page assez longue je vais coller un petit animal. Les animaux sont des amis à moi.

                                                                   

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