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mardi 24 janvier 2012

Sartre, la psychanalyse existentielle, généralités


Sartre et Freud, deux visions de l'homme

La théorie freudienne de l'inconscient est inattaquable mais, il  est important de savoir si notre langage et son contenu sont dictés par notre inconscient: "si nous parlons ou si nous sommes parlés par notre inconscient" , "ce voyou"...comme le dit Lacan. Les objections ne manquent pas.
La théorisation psychanalytique serait liée à l'époque de la Vienne de 1900 et, serait tout a fait inconcevable au temps de Rabelais par exemple. La psychanalyse est vue comme le dernier avatar de l'idéal ascétique, selon Deleuze et Guattari et, cela est exprimé dans leur ouvrage, L'Anti-Oedipe. Pour ces deux philosophes, Freud a bien exprimé la vérité de l'époque historique qui l'a vu naître: son inconscient est ténébreux et lubrique, et prêt à tout sous le couvert de termes scientifiques. Son théoricien se complaît dans la promiscuité sournoise du charnel, du sexuel, du génital, de l'anal...au sein, si l'on peut dire, d'une société puritaine, courbée sous le poids des tabous. L'expression artistique et, à plus forte raison, l'expression explicite de l'amour physique, étant sévèrement réprimées. Par exemple, le peintre Egon Schiele fut emprisonné pour ces dessins érotiques.

Egon Schiele, Amitié
     L'inconscient freudien serait en quelque sorte le résultat d'un défoulement intellectuel de haut niveau, rendu nécessaire dans une société où règne, en dictateur, un Surmoi implacable. Il est difficile de résister, pour illustrer ces propos, à la tentation (au désir?), de soumettre au lecteur un passage choisi du Livre du ça de Groddeck dont Freud disait qu'il le considérait comme un superbe analyste qui saisissait l'essence des choses. Il s'agit d'un ouvrage publié en 1923, composé de lettres fictives adressées à une amie où l'auteur développe sa thématique du ça, différente il est vrai de celle de Freud. Mais n'y-a-t-il pas là ce défoulement intellectuel de haut niveau symptomatique de la société cadenassée de l'époque?                                                                                                                                    
" Vous écrire, ma très chère amie, est un plaisir. Quand je raconte l'histoire de la castration à d'autres, ils se fâchent, m'envoient promener et me traitent comme si c'était moi le responsable du péché et de la malédiction originelle. Vous, en revanche, vous établissez aussitôt les parallèles avec la légende de la Création et, pour vous, la côte d'Adam dont on a tiré Eve est la partie sexuelle de l'homme. Vous avez raison et vous m'en voyez tout heureux.
Puis-je cependant attirer votre attention sur certains petits détails? D'abord une côte, c'est dur et raide. Ce n'est pas tout uniquement du pénis qu'est sortie la femme, mais du phallus, dur, raide, osseux, le phallus érigé du désir. Pour l'âme humaine, la volupté est un péché, un acte répréhensible et punissable. La punition par la castration suit la volupté. La volupté fait de l'homme une femme.
Faites une pause dans votre lecture, chère élève, et rêvez un peu à ce que cela a pu signifier encore pour le genre humain, pour son développement, que de ressentir comme un péché sa pulsion la plus forte, une pulsion impossible à dominer, que la volonté parvient tout juste à refouler, qui ne sera jamais détruite; ce que cela a pu signifier et signifie encore pour lui qu'un phénomène naturel, inévitable, l'érection, soit un objet d'oprobe et de honte. C'est du refoulement, de l'obligation de refouler ceci ou cela qu'est formé le monde dans lequel nous vivons." Geor Groddeck, Le livre du ça, Gallimard, 1963.   

Hélène Lagnieux, Eve
La théorie freudienne apparaît comme un jeu de langage supérieurement élaboré dans lequel un joueur gagne toujours et qui donc n'est plus un jeu. Il en est de même pour une théorie, qui a toujours raison contre les faits; quels que soit ces faits, elle n'est plus une théorie. Peut-on appliquer par exemple, aujourd'hui, la théorie du refoulement d'ordre sexuel, à des jeunes gens qui connaissent, même si des difficultés existent, une libération sans précédent, dans la diffusion, la pratique, l'encouragement même, de la sexualité? Dans nos sociétés démocratiques, cela s'entend.

Sarte était un lecteur de Freud mais sa critique dénonçait le double déterminisme de cette théorie: "le déterminisme vertical par la libido et le déterminisme horizontal par les circonstances extérieures" J.C.Merle, La psychanalyse existentielle chez Sartre, 2005. Il manque cruellement une dimension qui s'inscrit dans l'avenir du sujet qui dans sa philosophie redessine sans cesse son projet de vie et, qui est capable d'effectuer un tri entre les pulsions. Ce qui délivre la conscience de l'inconscient.

Dessin de Hans Bellmer
                                                                                                                                                                                    à suivre                      

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